Par Stanislas Colodiet, conservateur de musée
Musée Fabre, Hommage 2015
Quand je peins, ma personnalité disparait. Je n’ai plus qu’un seul langage, et ne pense qu’à l’alphabet de l’art qui est la ligne, l’espace, la surface, les couleurs, leurs amitiés et leurs inimitiés, les fo cés, les clairs. Colette Richarme, 1985
Voici la formidable profession de foi de Colette Richarme qui ne cessa de peindre depuis le plus jeune âge. Le musée Fabre lui rend hommage à la suite du généreux don reçu en 2011. Cet ensemble témoigne de la production de l’artiste réalisée à partir des années 40. On y trouve des dessins préparatoires, des « Palettes », petites compositions abstraites colorées où l’artiste essaie différentes combinaisons de couleurs, des gouaches souvent peintes sur le motif avant de réaliser de grandes compositions à l’huile. (…)
La démarche artistique de Colette Richarme se nourrit de la lecture des ouvrages théoriques de l’histoire de l’Art, comme le Traité de la peinture de Léonard de Vinci ou encore Les palettes de Delacroix de René Piot. Installée au mas de « La Vignette » à Montpellier en 1937, elle participe à la vie artistique locale et se rapproche de Georges Dezeuze, Camille Descossy ou encore François Desnoyer, peintres du groupe Montpellier-Sète.
Préférant la pratique à la théorie trop dogmatique, Richarme ne prend pas part au débat qui oppose l’art figuratif à l’art abstrait dit « Informel ». Pour elle, il n’y a pas de sujet abstrait, une peinture est toujours le résultat d’un travail de simplification à partir de l’observation de la nature. En retour, n’importe quel tableau est une peinture avant d’être un paysage, autrement dit, il est abstrait. En 1954, elle s’exprime à ce sujet comme suit : mon paysage est intérieur : le jaune, le bleu, le rouge seuls comptent. Je puise une idée dans la réalité et tout le reste du paysage est en moi. Quelques années plus tard, en 1977, elle écrit : la peinture est un jeu de l’esprit, une jouissance de l’œuvre… mais c’est un univers abstrait surtout lorsqu’on se détache de plus en plus du sujet.
Son travail se situe entre symbolisme et formalisme. Elle puise régulièrement ses sujets aux sources de la littérature, en s’inspirant de Mallarmé comme de la Bible. Ses peintures ne sont jamais pour autant des illustrations, elle préfère le terme d’ »équivalences plastiques ».
La question de la composition du tableau est le second pivot autour duquel s’articule son travail. Richarme est toujours à la recherche d’harmonie et d’équilibre entre les couleurs.
Voilà pourquoi je peins, cela tient en deux mots : la recherche d’un ton qui permet à deux couleurs de s’accorder, ou du moins se supporter. C’est la même philosophie que pour vivre en société.