par Jérome Farigoule, conservateur de musée
Le don, par les filles de l’artiste, au musée Fabre, d’un ensemble représentatif de plus d’une centaine d’œuvres – essentiellement des dessins – illustre différents moments et différents aspects de la carrière de Richarme. Colette Richarme est un jalon important du développement de la peinture Montpelliéraine dans la seconde moitié du XXe siècle.
Liée au Groupe Montpellier-Sète sans véritablement en être membre, elle accompagne le développement de ce courant artistique de l’après-guerre en développant une œuvre picturale et graphique entre figuration et abstraction. L’écho de son œuvre, de l’Hérault jusqu’à Paris où elle participa à de nombreuses expositions collectives ou monographiques, lui apporta une renommée certaine et en fit une figure majeure de la peinture montpelliéraine.
Née à Canton (Chine), elle vient en France en 1913. Elle se forme à Paris entre 1935 et 1937, en particulier dans l’atelier Brayer : elle y rencontre Louise Bourgeois avec qui elle noue une profonde amitié. L’artiste s’installe à Montpellier en 1937 à la Vignette, le mas où est aujourd’hui encore conservé son travail, et développe sa pratique au contact de la lumière du Midi. Pendant la Seconde Guerre, elle déploie une intense production graphique, inspirée de ses lectures, en particulier Mallarmé.
Cette lecture décisive aura une incidence pérenne sur l’art de Richarme, lui donnant une teneur spirituelle et symboliste sensible dans le thème de ses nombreuses études de figures et de nus. A la fin des années 1940, elle étend ses recherches chromatiques tout en restant fidèle à la figuration, travaillant sur le paysage qui restera un de ses thèmes de prédilection.
Pendant la même période, elle entame un important travail sur le motif de petites gouaches, réunies en carnets ou regroupées en portefeuilles qui sont tout à la fois un témoignage sur le quotidien du littoral héraultais (Palavas, Sète, Le Grau du Roi) et des études de composition chromatique particulièrement maîtrisées.
Sa première exposition individuelle se tient en 1955 à la Galerie Bruno Bassano. En 1957, Inspiration Sétoise entre au Musée national d’art moderne. L’année suivante, le musée Fabre acquiert le seul tableau de l’artiste dans la collection « Nature morte jaune et bleue ».
Les années 1970 demeurent une période intense de création où elle s’intéresse aux mutations modernes de la ville et du paysage : la série consacrée aux tours de la Paillade est à ce titre exemplaire. Richarme a ainsi pu bâtir une œuvre originale au processus d’élaboration complexe dans laquelle elle conjugue dessins, traitement de la ligne et études chromatiques – les palettes réalisées en plusieurs étapes après une longue maturation – où elle compose, ajuste et teste ses harmonies de couleurs. Cette association des pratiques constitue un des aspects les plus intéressants de son œuvre.